Sensationnelle
conception Julie Nioche & Isabelle Ginot
CREATION 2013
Durée : 60 min.
Actualités :
20 janvier 2018 - Festival Trajectoires - Nantes
4 et 25 au 28 juin 2018 : Tournée "l’Art n’a pas d’âge" avec l’ONYX - La Carrière dans 5 établissements d’accompagnement de personnes âgées à Saint Herblain et Nantes (Maison beauséjour à Nantes, EhPad La Bourgonnière, Les Bigourettes, la Crèmetterie et Accueil de jour de Saint herblain)
Automne 2018 - représentations dans 3 Ehpad de la Ville de Nantes
Conception Julie Nioche et Isabelle Ginot
Interprètes (distribution variable) Laurent Cèbe, Lucie Collardeau, Zoé Courel, Sarah Desaire, Margot Dorléans, Audrey Gaisan, Sonia Garcia, Miléna Gilabert, Isabelle Ginot, Nathalie Hervé, Kevin Jean, Bérénice Legrand, Lenaig Le Yeuc’h, Gabrielle Mallet, Barbara Manzetti, Philippe Mensah, Lisa Miramond, Julie Nioche, Laurie Peschier-Pimont, Annabelle Pirlot, Violeta Salvatierra
Dispositif chorégraphique et tactile
Sensationnelle propose d’explorer une relation singulière entre un danseur, un spectateur et un « toucheur », à partir d’un constat : regarder la danse, c’est la sentir (un peu). Confortablement assis, chaque spectateur assiste à une danse improvisée pour lui seul par un des danseurs, tandis qu’un autre engage avec lui un dialogue tactile, entre massage et détente, l’incitant à se concentrer sur son ressenti. Le spectateur est ainsi au centre du dialogue entre les deux danseurs, et entre ce qu’il regarde et ce qu’il ressent. Ce dispositif simple invite les trois personnes ainsi rassemblées à regarder, sentir et dialoguer... Écoute réciproque et attentions partagées permettent à chacun de contribuer à l’invention collective de cette proposition chorégraphique « sensationnelle ».
Sensationnelle est une réponse à nos doutes quant à la répartition des fonctions entre le danseur (qui agirait et sentirait) et le spectateur (qui regarderait passivement). C’est aussi une invitation adressée à ceux qui pensent cette relation (notamment les directeurs de théâtres, les équipes chargées des « relations publiques ») et contribuent à la structurer, à la fixer ou à la déplacer à travers les nombreux dispositifs d’accompagnement du public vers les œuvres.
Témoignage de spectateur
« Quand je vois une exposition de peinture, je ressens bien le geste qui s’est amalgamé dans une forme sur la toile. Ici c’est pareil à l’égard de la figure de la danseuse, mais en mouvement, dans l’instant. C’est une expérience de l’interaction. Quand on voit, on donne autant qu’on reçoit ».
Un spectateur, Festival C’est comme ça !, octobre 2013
Partenaires
Production
A.I.M.E. - Association d’Individus en Mouvements Engagés, Paris
Coproduction
C.N.D.C. d’Angers – direction Emmanuelle Huyhn
Le Forum – Scène conventionnée du Blanc-Mesnil
avec le soutien du département de Seine Saint-Denis
Le Bateau Feu – Scène nationale, Dunkerque
Le 3 bis f – Lieu d’arts contemporains, Aix-en Provence.
Tournées
Maison d’accueil spécialisée l’Escale et hôpital de Zuydcoote – avec Le Bateau Feu, Scène nationale de Dunkerque
EPADH de Montreuil - La Maison des Vergers
Le 3 bis f, Lieu d’arts contemporains, Aix-en Provence
C.N.D.C. d’Angers
Le Forum, scène conventionnée de Blanc-Mesnil
IME, Conservatoire, Maison pour tous Jean Jaurès, Centre de loisirs République à Blanc-Mesnil
Collège Victor Hugo et IME Toulouse Lautrec à Aulnay-sous-Bois
Etapes & contextes
2011 - Point de départ
En mars 2011, Julie Nioche est invitée par le Forum de Blanc-Mesnil où la compagnie est en résidence pour 3 ans à proposer un projet particulier de son choix à un petit groupe de spectateurs, environ 2 personnes sur une journée. Elle propose de rassembler 10 personnes travaillant ponctuellement avec A.I.M.E, danseurs et/ou praticiens somatiques, pour créer 5 duos toucheur/danseur qui rencontreront des spectateurs, 1 heure pour chacun, lui proposeront un « massage » en même temps qu’ils regarderont un solo de danse. C’est la première expérience à l’origine du projet Sensationnelle.
Après quelques mois de réflexion et d’échanges entre Isabelle Ginot et Julie Nioche, le projet Sensationnelle entre en processus de recherche/création début 2012 dans des contextes de travail particuliers qui leur sont proposés.
Saison 2012/2013
Sur la saison 2012/2013 le travail pour Sensationnelle s’est développé dans 3 contextes, autant d’espaces d’expérimentation du projet pour autant de créations :
- au C.N.D.C d’Angers avec 16 étudiants de l’école de danse auprès desquels Isabelle Ginot et Julie Nioche ont été invitées à intervenir 3 semaines depuis février 2012. Elles ont proposé aux étudiants de partager ce projet de création, travaillant avec eux la création d’un protocole de toucher à l’attention du spectateur, la question de l’improvisation en lien avec ce protocole, etc.. A l’occasion de 18 spectacles programmés pour la saison 2012/2013 au C.N.D.C. d’Angers, les étudiants proposeront des duos Sensationnelle aux spectateurs volontaires avant ces spectacles.
- dans deux structures d’accompagnements de patients handicapés à Dunkerque, dans le cadre de la résidence de A.I.M.E. au Bateau Feu / Scène nationale dunkerque.
- dans le cadre de la résidence au Forum sur la saison 2012/2013 - diffusion des duos Sensationnelle à l’attention des usagers et des équipes encadrantes dans les structures éducatives, sociales, médico-sociales partenaires du Forum pour des actions de sensibilisation où A.I.M.E est intervenu en 2011/2012 avec des ateliers de pratiques somatiques.
Saison 2013/2014
- le 24 mai 2014 pour l’ouverture du flambant théâtre rénové du BATEAU FEU, Scène nationale de Dunkerque, lors des fêtes de crémaillère, 3 représentations de Sensationnelle seront proposées au public venant découvrir leur nouveau lieu.
- le 18 décembre 2013 dans le cadre du projet d’échange européen Comenius à Dunkerque, 1 journée de représentation de Sensationnelle pour des patients, soignants et éducateurs de la maison d’accueil spécialisée l’Escale et de l’hôpital de Zuydcoote et des enseignants du collège Boris Vian. Avec Le Bateau feu, Scène nationale de Dunkerque.
- du 16 au 20 décembre 2013, en partenariat avec le DU « Techniques du corps et monde du soin" fondé par l’Université Paris 8 avec le soutien de A.I.M.E. en 2009, l’équipe de A.I.M.E. et l’ensemble des professionnels danseurs ou somaticiens stagiaires de la formation ont réalisé une résidence de 5 jours à l’EPADH de Montreuil - La Maison des Vergers, afin de présenter Sensationnelle aux personnes âgées y résidant et au personnel de la maison. Les stagiaires du D.U. avaient auparavant suivi une semaine de formation au projet dirigée par Julie Nioche et Isabelle Ginot
- du 9 au 13 septembre 2013 : à l’invitation du 3 bis f, lieu d’arts contemporains basé dans les murs de l’hôpital psychiatrique Montperrin à Aix-en-Provence, 4 jours de diffusion de Sensationnelle avec une équipe de 6 artistes ont eu lieu dans plusieurs structures hospitalières ou para-médicales d’Aix et des alentours, à l’attention d’un public mélangé entre résidents et équipe des structures, public extérieur.
Témoignage - retour
PUBLICATION PARUE DANS LE JOURNAL DU "BATEAU FEU EN PROMENADE" EN SEPT/OCT. 2012 - Rédaction Christophe Potier / directeur adjoint du Bateau Feu, Scène nationale de Dunkerque.
Au printemps dernier, les danseurs Milena Gilabert et Philippe Mensah, membres de l’association A.I.M.E., sont intervenus dans deux établissements médico-sociaux de l’agglomération, le foyer AFP Les Salines de Dunkerque et la MAS Le Trimaran à Zuydcoote. Le 19 septembre dernier, une proposition chorégraphique intitulée Sensationnelle s’est déroulée dans chacun des lieux. Retour sur une expérience exemplaire et originale entre danse et techniques de soin...
Sensationnelle(s)
Le Foyer Les Salines dépend de l’Association française des paralysés de France et accueille des personnes en situation de handicap moteur. Le projet de l’établissement met l’accent sur l’exercice d’une citoyenneté pour les personnes accueillies, afin qu’elles soient en mesure de participer à la définition de l’organisation de la structure, qu’elles puissent y mener des activités valorisantes et s’inscrire dans la vie sociale et culturelle de l’agglomération. La Maison d’accueil spécialisée Le Trimaran de l’Institut Vancauwenberghe à Zuydcoote propose une alternative en terme de suivi médical pour les adultes de plus de vingt ans polyhandicapés ou traumatisés crâniens.
Expérimenter les pratiques somatiques
Partenaires du Bateau Feu depuis plusieurs années, ces deux structures ont accepté de s’engager cette année dans une démarche innovante en accueillant dans ses murs les intervenants de l’association A.I.M.E. (Association d’individus en mouvements engagés) dirigé par la chorégraphe Julie Nioche (voir portrait en dernière page). Ainsi, depuis avril dernier, les danseurs Milena Gilabert et Philippe Mensah ont animé douze séances d’ateliers ayant pour objectif une approche de la danse par le biais de techniques somatiques : des techniques douces et ludiques visant à ressentir son corps, à le mettre en mouvement, à prendre conscience de ses gestes, à se concentrer sur ses propres sensations... Dans chacune des deux institutions, ces explorations ont réuni les soignants et les résidents.
Au sein de A.I.M.E., Julie Nioche et ses partenaires travaillent énormément à partir des pratiques somatiques. Il s’agit de techniques douces qui permettent de travailler l’éveil sensoriel, la capacité à sentir et à comprendre son corps... Les plus connues portent le nom de leurs créateurs, Feldenkrais ou Alexander. La force de ces méthodes somatiques, que connaissent bien les danseurs, c’est qu’elles sont adaptables à tous les corps, les corps indemnes comme les corps meurtris. Elles permettent de travailler avec des personnes en grande difficulté physique, mentale ou sensorielle.
La résidence s’est achevée à la mi-septembre à l’occasion de deux restitutions réservées au personnel et aux résidents des deux structures. Il s’agissait de montrer le travail mené lors des ateliers, notamment le travail d’exploration du ressenti, d’écoute, de partage, d’expérience collective.
« Je dansais avec lui »
Conçue par Julie Nioche (chorégraphe) et Isabelle Ginot (enseignante-chercheure), et interprétée par les danseurs Milena Gilabert, Philippe Mensah, Margot Dorléans et Julie Nioche, la proposition chorégraphique intitulée Sensationnelle invite chaque spectateur à une expérience singulière et privilégiée avec deux d’entre eux. Un danseur entre en contact avec un spectateur, installé confortablement, tandis que l’autre danseur improvise pour lui, et lui seul, une danse en écho aux manipulations qu’il est en train de ressentir. Ce dispositif simple, en apparence, invite les trois personnes ainsi rassemblées à regarder, sentir et dialoguer... Écoute réciproque et attentions partagées permettent à chacun des participants de contribuer à l’invention collective de cette proposition chorégraphique « sensationnelle ».
Après chaque performance, les participants ont pu s’exprimer par écrit.
"Je ne m’attendais pas à ça. J’ai eu l’impression de rentrer dans ses gestes, pas dans lui, mais dans ses gestes. Je dansais avec lui", avoue Stéphane.
Pour Tony "c’était génial. La personne qui me touchait, je ne la sentais plus. J’étais vraiment en phase avec l’autre personne qui dansait. Ce qui fait que ça m’a aidé à me détendre. Beaucoup de grâce, beaucoup de beauté. Et puis une interaction à travers trois personnes. C’était vachement émouvant."
"Ce qui est surprenant, c’est le lien entre ce que l’on ressent et ce que le danseur renvoie", explique Agnès.
Quant à Lydie, elle raconte que "ça fait du bien. Je ressens une sensation de bien-être. Ce n’est pas juste un massage qui fait du bien au corps... Voir en plus le danseur bouger fait aussi du bien à l’esprit. On se détend, on voyage... "
Si l’expérience a été très riche pour les soignants et les patients, elle l’a également été pour les danseurs comme le raconte avec émotion Philippe Mensah, qui a co-animé les douze séances d’ateliers et a participé aux deux performances finales.
"Un trio très fort et avec de multiples possibilités de relations s’est installé pendant tout le temps de la performance. Le fait que la personne au centre soit handicapée ajoute une dimension encore plus forte : j’étais un peu ses jambes, membres qui sont tant en souffrance chez les patients des Salines et du Trimaran. Quoi de plus fort que de bouger, d’interpréter le vécu kinesthésique, sensoriel, corporel d’une personne dont ce sont justement l’une des souffrances principales ! J’ai pu également ressentir de manière très profonde leurs limites, l’enfermement dans leur corps qu’ils subissent en permanence, d’autant plus que j’étais, moi, dans ma liberté ! Liberté de mouvement corporel (avec mes propres limites bien sûr) mais aussi liberté d’improvisation dans la danse où je dois sans cesse créer le chemin sur lequel je m’avance. Chemin structuré et borné par les règles intrinsèque de ce dispositif ; mais également par ce qui se passe entre le receveur et le toucheur.
Dans le toucher, on dit que la personne qui touche l’autre est aussi touchée par lui. Il n’y a donc jamais de position de réception passive d’un toucher. J’ai le sentiment que c’est la même chose ici : je suis autant bougé par le receveur que je bouge pour lui. Si je suis ses jambes, je suis tout autant son corps pendant ce temps hors temps. Une expérience personnelle et interpersonnelle très forte"